1978, les filiales de Chrysler Europe sont rachetées par le récent groupe PSA formé après le sauvetage de Citroën en 1976. Peugeot voit grand en voulant devenir le GM Européen en héritant des marques Simca, Rootes et Barreiros. Une vision qui va vite tourner à la désillusion à cause de problèmes structurels et conjoncturels. Le choc pétrolier de 1979 ébranle de nouveau un secteur qui vient tout juste de se sortir du premier choc de 1973. Le récent groupe a du mal à organiser et structurer tous les outils industriels. Les gammes des différents constructeurs vieillissent et les nouvelles marques acquises n’ont aucun projet dans les cartons. La réunion de ces nouvelles entités sous le nom Talbot en 1979 va brouiller l’esprit des consommateurs. Le groupe est au plus mal avec plus de 2 milliards de francs de pertes en 1981 et des parts de marché qui tombent au plus bas historique en 1982, avec seulement 12.7% pour Peugeot et 5.3% pour Talbot. Une situation alarmante qui va être sauvée in extremis par un modèle à la réussite inattendue, la 205. Retour sur son histoire.

La longue gestation de la Peugeot 205

En 1977, le segment des petites et moyennes voitures est occupé par la 104 qui mène une carrière respectable depuis 1972 (lire 50 ans de la 104 : la petite Peugeot sort ses crocs). Un modèle bien né qui ne peut lutter contre le succès insolent de la Renault R5 qui a un boulevard devant elle (lire : 50 ans de la R5, elle ne manque pas d'air). La 104 est trop sérieuse et trop petite. Dans les hautes sphères du constructeur, on réfléchit alors au remplacement de la 104 avec le projet M24. Les grandes lignes du cahier des charges sont fixées avec un empattement identique à la 104, mais une voiture plus large. Les versions 5 portes et 3 portes auront les mêmes côtes et cette dernière devra avoir une véritable identité. Le poids ne doit pas dépasser 800 kg. Les grandes lignes sont là, même si elles vont évoluer tout au long du développement qui commence officiellement le 12 juillet 1978. Le projet a déjà un nom, ça ne sera pas 105 comme la presse pouvait encore l’annoncer en 1981, mais bien 205. Un chiffre voulu et défendu tout le long du développement par Jean Boillot, haut cadre de chez Peugeot qui passera successivement de membre du directoire en 1976, à directeur général en 1979 avant d’être président d’Automobiles Peugeot en 1984. Ce choix n’est pas anodin et annonce une rupture. La série des 200 a toujours eu une place innovante dans l’histoire de Peugeot. La 201 a inauguré la nomenclature à 3 chiffres avec le 0 au centre et a été la première voiture avec des roues indépendantes à l’avant, la 202 a bénéficié de recherches aérodynamiques poussées, la 203 a relancé Peugeot à la sortie de la 2 GM et la 204 a été révolutionnaire en étant la première traction de la marque. La nouvelle Peugeot se doit d’être révolutionnaire à sa manière. 

Marqueur d’un produit bien né, les grandes lignes du dessin de la future 205 sont déjà fixées dès 1978 par le directeur du style de l’époque, un certain Gérard Welter. Sans le savoir, il vient d’esquisser le projet le plus important de sa vie. Un coup de crayon tel que la maquette présentée par Pininfarina, allié de longue date du style Peugeot, ne sera pas retenue lors de la confrontation le 5 janvier 1980. Un dessin qui a légèrement évolué pour matcher avec les nouvelles dimensions retenues. En 1980, les statistiques du marché montrent que le segment B1 des petites voitures (2cv et R4) est en perte de vitesse alors que le segment B2, où joue la R5 (entre 3.50 et 3.70m), explose avec plus de 40% des immatriculations en France. À l’export, le segment supérieur M1 (4m) dans lequel se positionne la Golf et l’Opel Kadett est très important. Un entre deux sera retenu en choix définitif, ça sera 3.80m.

À l’intérieur, c’est la proposition du célèbre Paul Bracq qui est retenue pour sa modernité et son bloc d’instrumentation facilement interchangeable pour les marchés à volant à droite.

La révolution de la 205

Dans la recherche à l’innovation, les concepteurs vont s’appuyer sur les éléments retenus sur le concept Vera sorti en 1981, pour en faire une voiture ancrée dans son temps. Ce concept répond aux nouvelles exigences de consommation, mais aussi de sécurité passive avec un poids réduit et un Cx très travaillé. Les éléments de la future 205 sont là. Le dessin typique des pare-chocs, la calandre basse avec des joints obturés par des caoutchoucs ou encore les vitres affleurantes sont d’autant d’éléments repris sur la 205.

La réduction du poids a aussi été primordiale avec l’adoption, sur la 205, du train arrière à amortisseurs horizontaux du concept Vera. La conception assistée par ordinateur qui avait fait son entrée timide en 1972 chez Peugeot, devient un élément important dans la conception de la voiture. Cette assistance permet de perdre 26 kg sur la caisse par rapport à la 104, tout en ayant une rigidité supérieure grâce à la diminution de 40% du nombre de points de soudure et grâce à l’utilisation d’aciers à haute limite élastique.

Le modèle est enfin prêt pour une longue série de test de fiabilité dans le centre technique de Belchamp dans le Doubs. Une anecdote montre l’étendue des tests. Les nouvelles serrures actionnables par une clé unique – une première – possèdent une lèvre métallique qui se ferme en l’absence de clef permettant d’éviter le gel. Pratique en ces temps polaires pour éviter de reproduire une certaine scène des bronzés font du ski ! Pour éprouver ce système plus de 100 000 cycles d’essai ont été réalisés dans les conditions les plus difficiles.

Même si quelques photos ont fuité dans la presse, personne n’imagine le raz-de-marée que va provoquer la 205. Les clients ont pu approcher dès 1982 la nouvelle stratégie de Peugeot avec la 305 Serie 2 plus prestigieuse scandant « Un constructeur sort ses griffes ». Les moyens sont mis pour marquer les esprits. Le 20 janvier 1983, la 205 est présentée aux concessionnaires à Monaco. Elle fait l’unanimité au lever de rideau. La voiture commence à côtoyer les futurs clients avec les 150 premiers exemplaires livrés dans les concessions pour des tests en toute liberté. Le 21 février, la presse publie les premiers essais avant que la 205 ne soit disponible officiellement le 24 février. À son lancement seule la version 5 portes – a plus fort volume – est présentée en 7 versions différentes réparties en 5 finitions et trois moteurs. On retrouve alors les moteurs X de la Française des Mécaniques, montés sur la 104. Trois cylindrées sont proposées allant de 954 cm3 à 1360 cm3 en passant par 1124 cm3 pour des puissances de 54 à 80 ch.

Sobre, performante, confortable et à la tenue de route exemplaire, la presse est dithyrambique. La voiture séduit rapidement les clients et en quelques mois c’est déjà un succès avec 5% des parts du marché français.

Rendez-vous dans la deuxième partie pour redécouvrir toutes les versions qui ont contribué à la réussite de sa carrière. ;) 

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